Permis de conduire : à quand une vraie révolution ?

Aide a la conduite
A l’automne 2015, la grande loi sur « la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques », portée par un Emmanuel Macron ministre de l’Economie, mettait un coup de pied dans la fourmilière des auto-écoles. Il fallait débloquer un système en panne et éviter aux apprentis conducteurs de perdre temps, argent et nerfs dans leur conquête du permis de conduire. Un objectif louable, mais loin d’être entièrement atteint malgré les efforts de l’Autorité de la concurrence pour redonner au permis de conduire ses lettres de noblesse. Le permis de conduire reste une étape importante, un rite initiatique, dans la vie d’une majorité de jeunes adultes. Il est le signe d’une autonomie et de responsabilités croissantes, mais malgré son utilité, les jeunes s’en détournent de plus en plus à en croire les statistiques et sondages produits ces dernières années. Les critiques à l’égard du permis de conduire ne sont pas nouvelles et c’est désormais l’Autorité de la concurrence qui rappelle régulièrement à l’ordre les professionnels du secteur qui ont du mal à en finir avec de vieilles pratiques dont l’inefficacité a été prouvée.  

L’Autorité de la concurrence à la reconquête du permis

Le volet « permis de conduire » dans la loi Macron de 2015 avait pour objectif de réduire des délais d’obtention du désormais ex-papier rose. Mission en partie remplie, mais qui butte toujours sur le processus d’attribution des places pour les candidats. Les places sont données aux auto-écoles en fonction de leurs résultats passés. Un système baroque qui ne fait que perpétuer la marche branlante d’un secteur qui fabrique des milliers de candidats déçus et qui ont l’impression d’avoir été dupés. Le budget moyen en France est élevé pour obtenir le permis de conduire (plus de 2 000 euros) et les délais encore supérieurs à ce qui se pratique dans le reste de l’Union européenne (environ 72 jours contre 45 jours chez nos voisins). Face à des blocages toujours persistants, l’Autorité de la concurrence a levé le lièvre du système d’attribution.   Pour fluidifier l’examen, il est préconisé de tenir compte des besoins réels, chaque mois, basés sur le nombre de candidats enregistrés dans les auto-écoles qui ont obtenu leur code, mais qui n’ont pas encore leur permis de conduire. Une solution simple qui va dans le sens de la législation de 2015, mais qui a le don d’énerver des structures qui doivent prendre en compte de nouveaux entrants sur le marché avec en premier lieu les auto-écoles en ligne. Le rôle des auto-écoles reste discuté : ont-elles vocation à jouer un si grand rôle dans l’examen du permis ou doivent-elles se cantonner à un rôle de formateur ?  

Bénéfices et carences issus de la loi Macron

L’association de consommateur UFC Que Choisir aurait tendance à privilégier la seconde option au regard de l’enquête menée il y a un an et qui signale moult défauts et abus de la part des auto-écoles. Frais d’accompagnement à l’examen, heures de conduite supplémentaires en grand nombre, taux de réussite à l’examen falsifiés afin d’attirer plus d’apprentis conducteurs, les ficelles utilisées par bien des professionnels indélicats ont été dénoncées une fois de plus. Et malgré la loi Macron votée en octobre 2015, l’UFC Que Choisir appelle à « une réforme structurelle ». Cette dernière aurait pour axes principaux le développement des écoles en ligne, l’augmentation sensible du nombre de candidats libres et la création d’un statut d’accompagnateur professionnel certifié pour donner des heures de conduite supplémentaires. Des solutions in fine bénéfiques pour le budget des élèves, mais qui met à mal le business des auto-écoles physiques. La loi Macron a visé dans cette même direction avec notamment l’idée de ne plus marginaliser les candidats libres et de leur accorder ainsi autant de droits que les candidats issus des auto-écoles. La Grande-Bretagne s’est déjà prêtée au jeu de la libéralisation du secteur avec un grand succès. La loi Macron a, quant à elle, constitué une initiative positive, mais encore insuffisante.

Encore un effort

Les délais se sont raccourcis depuis deux ans notamment pour les candidats libres qui doivent ronger leur frein 5 mois avant de passer l’examen contre 9 mois en 2015. En choisissant un modèle plus libéral dans lequel les auto-écoles font essentiellement de la formation, le système se débloque peu à peu et pourrait réconcilier les jeunes Français avec le permis de conduire. Il s’agit là d’une nécessité dans un pays qui compte environ 500 000 conducteurs sans permis de conduire. Malheureusement, dans un tel édifice, le moindre grain de sable peut signifier la paralysie comme celle rencontrée depuis plusieurs semaines en Seine-Maritime. Les auto-écoles forment, mais les apprentis conducteurs doivent attendre environ trois mois pour espérer obtenir une place. En espèce, le goulot d’étranglement vient du nombre insuffisant d’examinateurs sur le territoire. Ils ne sont que 22 actuellement contre 28 en temps normal et certains n’hésitent pas à pointer du doigt les arrêts maladies qui gangrènent la profession d’examinateur. La préfecture assure que le retour à la normale est désormais une question de jours. En attendant, les apprentis de Seine-Maritime rejoignent, s’il en était besoin, les légions de jeunes conducteurs qui voient d’un bon œil la libéralisation d’un secteur où de nouveaux professionnels agréés pourraient parer aux carences d’un système qui a fait son temps.


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