Luca de Meo, président de l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) et PDG de Renault, était l’invité de France Inter, samedi 7 septembre 2024. Loin d’être rassurant, il a mis en garde contre l’écart entre les objectifs de réduction des émissions de carbone imposés par l’Union européenne, les sanctions prévues par cette dernière dès 2025 pour ses constructeurs automobiles, et la réalité du marché de la voiture électrique.
15 milliards d’euros d’amende dès 2025
L’idylle promise par la voiture électrique vire en cauchemar pour les constructeurs automobiles européens. En août 2024, elle représentait à peine 12,5 % des ventes de véhicules. Pis encore, les ventes ont baissé de 10,8 % en l’espace d’une année. Pourtant, l’Union européenne maintient les échéances de réduction des émissions à ses constructeurs, prévoyant même des sanctions financières si ces derniers ne les atteignent pas. La première date butoir est fixée non pas en 2035, mais au 1ᵉʳ janvier 2025 : les constructeurs européens devront avoir réduit de 15 % les émissions de CO2 de leur production (véhicules neufs) par rapport à celles de 2021.Concrètement, cela signifie que les constructeurs européens paieront une amende à partir du moment où leurs prochains véhicules produits émettront plus de 94 grammes de CO2 par kilomètre, contre 116 g actuellement, soit 95 euros par gramme, multipliés ensuite par le nombre de véhicules produits.
« Mettre simplement des échéances et des amendes sans avoir la possibilité de flexibiliser, c’est très dangereux », avertit Luca de Meo au micro de France Inter. Si ces derniers ne respectent pas cette échéance, et que le marché de la voiture électrique reste en berne — ce qui est fort probable — « l’industrie européenne va peut-être devoir payer 15 milliards d’euros d’amendes », a-t-il déclaré. Cela signifie que les constructeurs européens devront payer une amende de 95 euros par gramme de CO2 excédentaire rejeté par kilomètre pour les nouveaux véhicules produits.
Des objectifs intenables au vu du marché actuel de la voiture électrique
Luca de Meo estime que « l’incertitude » qui règne autour des aides décourage les consommateurs et freine la progression du marché. Il réclame plus de cohérence et de stabilité : « On a besoin de stabilité, de visibilité et d’une certaine cohérence », a-t-il plaidé. Les prix des voitures électriques sont encore trop élevés, les bornes de recharge manquent cruellement, et les subventions à l’achat ont été supprimées par plusieurs des 27 pays membres, rappelle Luca de Meo. L’exemple le plus révélateur est celui de l’Allemagne, qui a vu ses ventes de voitures électriques chuter de près de 70 % (68,8 %) en un an en raison de l’arrêt du bonus écologique.
Telle que la situation se profile, le seul moyen pour l’industrie automobile européenne – déjà mise à mal – d’échapper aux sanctions européennes en 2025, selon Luca de Meo, sera de « renoncer à la production de plus de 2,5 millions de véhicules ». L’objectif fixé par Bruxelles de vendre 25 % de véhicules électriques d’ici 2025 semble intenable. Pour Luca de Meo, l’industrie doit avoir la possibilité d’ajuster ses objectifs en fonction des réalités du marché. « Il faut qu’on nous donne un peu de flexibilité », a-t-il réclamé, soulignant que sans cette souplesse, le secteur automobile européen pourrait ne pas survivre à cette transition.
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